Ilium, tome 2 : Olympos de Dan Simmons

Publié le par Walpurgis

Roman SF

Format poche

Traduction : Jean-Daniel Brèque

Edition : Pocket

Date de parution : 2008

Nombre de pages : 1010

Échappant au scénario d'Homère, Achille et Hector se sont alliés pour vaincre les dieux et assiéger leur forteresse martienne. Ils profitent de la porte ouverte dans l'espace par les Moravecs, qui leur apportent un sérieux appui. Mais la porte commence à se refermer...
Sur Terre, les Voynix, qui ont longtemps été les serviteurs des Derniers Hommes, ont soudain entrepris de se révolter. Les Derniers Hommes, élevés dans la soie, vont devoir apprendre à se battre…

La guerre de Troie n'est plus, enfin pas celle que l'on connaît. Alors que la trame était tissée d'avance, l'imprévisible et le chaos sont devenus les maîtres du destin. D'autres menaces pèsent et ce roman-fleuve nous les expose par chapitres alternatifs. Le devenir des dieux olympiens, des héros troyens et grecs, des humains à l'ancienne ou encore des moravecs est conté en plus de 1000 pages. 

C'est une oeuvre dense et le lecteur dévore tout avec intérêt même si quelques longueurs sont présentes mais gâchent finalement peu la lecture. Surtout que ce livre offre de purs moments d'héroïsme avec beaucoup d'événements majeurs qui accentuent la curiosité du lecteur. Le style de Dan Simmons est excellent et c'est un plaisir de le lire, les choses sont expliquées mais il reste de l'espace pour formuler des hypothèses. A la fin du livre, quelques questions restent en suspens mais ne sont pas dérangeantes pour la compréhension du récit.

La vraie force du roman réside aussi dans son érudition. Dan Simmons s'est extrêmement bien documenté sur des sujets différents. Il y a énormément de références littéraires notamment via les moravecs férus de littérature humaine ainsi à côté de l'Illiade, sont cités Shakespeare, Proust ou encore James Joyce. Du fait, c'est assez jouissif car cela donne envie de lire ou relire ces auteurs. Mais on apprend aussi énormément sur les mœurs grecques et troyennes, les relations entre ces deux rivaux au-delà du prisme de la guerre. Enfin la partie sur la Terre avec l'apocalypse survenue nous plonge dans l'uchronie où un califat a fait la guerre à l'union européenne et autres pays pour propager sa foi. Ce dernier point a fait polémique surtout lorsque Dan Simmons a écrit Flashback où ce propos s'est retrouvé, semble-t'il, simplifié et surtout de façon manichéenne. Bref, ici, cela ne m'a pas choqué l'ayant perçu comme une donnée du roman et non pas comme l'opinion de l'auteur. 

Comme dit plus haut, les points de vue alternent entre différents protagonistes et seul le lecteur arrive à relier les différentes aventures entre elles. Hector et Achille maintenant alliés, la guerre de Troie se transforme donc en guerre contre les dieux. Une décision qui va donner naissance à une partie très évolutive de l'histoire car alliances, mésalliances et complots se succèdent. Des personnages qu'on voyait comme inactifs voire plus que secondaires se révèlent importants, je pense notamment à un groupe de femmes troyennes où l'on retrouve Hélène et Andromaque. Du fait on a l'impression que tout peut être bouleversé assez rapidement lorsque les masques tombent. Du côté grec, l'accent est mis sur Achille qui va se trouver un autre allié plutôt étonnant pour combattre les dieux. Son histoire a quelque chose de pathétique teinté de cynisme, le héros grec est tourné quelque peu en dérision via une situation, il est vrai, plutôt comique le connaissant. 

Les moravecs, devenus alliés des guerriers troyens et achéens, essayent de comprendre les perturbations quantiques entre cette Mars terraformée et la Terre. Ils sont le liant des différents protagonistes. Résolument dans l'enquête et l'action, il leur tient à coeur de préserver les humains qu'ils admirent. Ce sont des personnages très attachants et finalement plus humains que les héros de l'Illiade ou que les humains à l'ancienne. Dan Simmons leur a donné beaucoup d'humour et d'érudition et il est intéressant de suivre leur trajectoire. Pétris de questions existentielles, ils sont aussi les justiciers de l'espace et démontrent plusieurs fois dans le roman leur incompréhension du comportement humain face à la destruction.

A leurs côtés (le plus souvent), on retrouve l'ancien scholiaste Hockenberry. De premier plan, il passe en retrait tout comme Odysseus qu'on retrouve sous deux états : jeune et vieux. L'ancien professeur est pétri des défauts et des incertitudes de son genre humain et surtout il est complètement dépassé par la situation qu'il a engendré. Sa passion de l'Illiade et d'Hélène (!) le poussent à prendre des décisions irraisonnées. 

Puis évidemment il y a nos fameux humains à l'ancienne. Surpris par la révolte des voynix, ils se retrouvent à devoir lutter pour leur survie. Ce sont les personnages qui évoluent le plus vite et qui provoquent le plus de digressions existentielles surtout avec l'apparition de la mort dans leur vie. Daeman est sans doute le personnage qui m'a le plus étonné de par son changement. Loin d'être le garçon frivole du premier volume, il se révèle complètement dans ce récit, révélation exacerbée par son duel avec Caliban, devenu son ennemi juré. Ses décisions font partie des choses les plus passionnantes de l'histoire amenant un supplément d'horreur et de terreur dans l'histoire. Je m'attarderai aussi sur le couple Ada et Harman qui vivent des aventures séparées. Si Harman se voit engagé dans un parcours tourné vers le passé et le savoir, Ada est la chef reconnue et accepté d'Ardis. Ses passages sont fortement tournés vers l'introspection et la survie dans un monde hostile.

Et après la connaissance de Prospéro et Caliban, d'autres "déités" font leur apparition luttant entre elles dans un combat assez confus pour les planètes et l'humanité. C'est sans doute là où l'on manque un peu d'explications et de réponses.

Si on peut avoir des préférences, toutes les aventures méritent l'attention du lecteur. Dan Simmons a écrit un récit spectaculaire et érudit ponctué de dialogues à la fois triviaux (les dieux, les héros de l'Iliade) et posés et construits (moravecs, les autres "déités"). Cela donne parfois des réactions cocasses qui m'ont beaucoup fait sourire chez certains personnages bruts de décoffrage.

Le diptyque Ilium et Olympos brille de par une intrigue dense qui réinvente le mythe de l'Illiade et qui vous emmènera jusque dans l'espace. Bien documenté, bien écrit avec des dialogues parfois drôles, Olympos clôt de belle manière ce récit titanesque.

 

Publié dans SF, Mythologie

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