Armaggedon Rag de George R.R. Martin

Publié le par Walpurgis

Roman fantastique

Grand format

Traduction : Jean-Pierre Pugi

Edition : Denoël

Date de parution : 2012

Nombre de pages : 525

Baby, you cut my heart out
Baby tu m'as arraché le cœur chantait le Nazgûl
Baby, you made me bleeeeed !
Baby tu m'as fait saigneeeer !
Il ferma les yeux et écouta, et c'était presque comme si une décennie s'était soudain envolée, comme si West Mesa n'avait jamais eu lieu, comme si Nixon était encore à la Maison Blanche et que la guerre du Viêt-nam faisait toujours rage et que le Mouvement était encore bien vivant. Mais quelque part, parmi les lambeaux de ce passé, une chose demeurait la même : Jamie Lynch était mort. Et on lui avait bel et bien arraché le coeur...

Ce roman me faisait de l'oeil depuis un moment mais j'ai eu du mal à le trouver jusqu'à ce qu'il soit sur une étagère de librairie d'occasion à m'attendre. Déjà, c'est George R.R. Martin dont j'aime les romans (et pas seulement Le Trône de Fer) et surtout ça parle de rock des années 60-70 et ça j'adore ! La quatrième de couverture parle d'une enquête sur un meurtre peut-être satanique mené par un ancien journaliste, Sandy Blair. Toutefois ce livre est loin d'être un thriller et voilà pourquoi.

Ce roman est avant tout un hommage à la contre culture rock des années 60-70. Chaque chapitre s'ouvre sur quelques paroles d'artistes connus de l'époque comme The Doors ou Jimi Hendrix, pour les plus connus. Martin nous plonge dans une ambiance incroyable lors des passages consacrés à cette époque où le changement semblait possible. Il croque une génération de baby-boomers désireux de vivre libres loin du carcan imposé par leurs parents et le gouvernement. C'est le temps de la protestation contre la guerre du Vietnam et la chute de Nixon, c'est le mélange des classes sociales, c'st l'ouverture aux études supérieures pour une majorité bref une époque bouleversante pour tous car le champ des possibles est immense.

Sandy, le personnage principal, est l'incarnation de cette jeunesse qui se retrouve loin de ses idéaux de jeunesse en ces années 80 où l'action principale du roman a lieu. Il est devenu écrivain à succès, vit de façon bourgeoise avec une agente immobilière mais il n'arrive pas à écrire son roman suivant. Alors lorsqu'un coup de fil lui annonce le meurtre de Jamie Lynch, ancien impresario des Nazgûls groupe emblématique de l'époque, il fonce afin de fuir sa panne d'inspiration mais aussi par envie de renouer avec son passé.

Au fil de l'enquête sur ce meurtre, on sent un réel désenchantement de la part de Sandy. Nostalgique, il constate que pour beaucoup les idéaux de jeunesse ont été mis de côté et rangés dans les souvenirs que ce soit les anciens Nazgûls ou ses anciens amis d'université. La pilule est dure à avaler et voir les radicaux d'autrefois devenir les yuppies d'aujourd'hui fait réfléchir Sandy sur son propre itinéraire. Les fantômes du passé commencent à le hanter de façon inquiétante, peut-être une façon de ne pas complètement enterrer son passé.

Evidemment l'enquête se poursuit tout le long du livre mais ce n'est pas ce qui est le plus intéressant puisque c'est le parcours initiatique de Sandy pour être en paix avec lui-même qui prend aux tripes. L'arrivée d'une pointe de fantastique permet de se replonger dans une période contestataire alors qu'on la croyait morte. L'influence de la musique y est analysée sous toutes les coutures jusqu'à montrer à quel point elle peut pousser les gens dans la folie ou la rébellion. C'est aussi une réquisitoire en faveur de la musique créative loin des standards proposés sur les ondes. 

En conclusion, on est loin de l'enquête un peu satanique à la sauce Manson que nous vend la quatrième de couverture, c'est un portrait teinté de nostalgie et dressé avec lucidité sur une génération et une période incroyable qui ont sombré dans le désenchantement. Un bel hommage !

 

Publié dans Fantastique

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M
Sur ma wishlist depuis une éternité! Dès que je peux bouger hors de chez moi, j'essaie de me le dégoter en librairie. Merci pour cette belle chronique. ;)
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W
Il rend super bien l'atmosphère des années 70 et le talent de conteur de Martin est bien là.