Le nom de la rose d'Umberto Eco

Publié le par Walpurgis

Roman policier historique

Format poche

Traducteur : Jean-Noël Schifano

Edition : Le livre de poche

Date de parution : 1983

Nombre de pages : 633 pages

Rien ne va plus dans la chrétienté. Rebelles à toute autorité, des bandes d'hérétiques sillonnent les royaumes et servent à leur insu le jeu impitoyable des pouvoirs. En arrivant dans le havre de sérénité et de neutralité qu'est l'abbaye située entre Provence et Ligurie, en l'an de grâce et de disgrâce 1327, l'ex-inquisiteur Guillaume de Baskerville, accompagné de son secrétaire, se voit prié par l'abbé de découvrir qui a poussé un des moines à se fracasser les os au pied des vénérables murailles. Crimes, stupre, vice, hérésie, tout va alors advenir en l'espace de sept jours.

Même si l'oeuvre d'Umberto Eco nécessite beaucoup de concentration et de connaissances, j'aime le lire et il me tardait de découvrir son premier roman mondialement connu, Le nom de la rose.

Qualifié de policer médiéval, ce roman est avant tout une grande fresque du monde religieux du XIVe siècle. Il faut donc s'armer de connaissances pour pouvoir apprécier à sa juste valeur ce roman érudit et encyclopédique (termes que je rattache toujours aux romans de Mr Eco).

Si l'enquête policière est restée dans les mémoires, c'est dû à l'adaptation cinématographique de Jean-Jacques Annaud. Umberto Eco propose une enquête noyée sous des digressions philosophiques, religieuses et historiques qui apportent beaucoup au lecteur si celui-ci consent à se laisser charmer.

Narré par Adso de Melk, le récit prend place en 1327 dans une abbaye italienne assez isolée. Haut lieu de connaissances, l'abbaye doit être le cadre d'une rencontre entre envoyés du pape avignonnais Jean XXII et religieux soutenus par l'empereur Louis de Bavière. Une rencontre compromise par la découverte d'un crime sur un jeune moine de la communauté. La présence de Guillaume de Baskerville, ancien inquisiteur habile, accompagné d'Adso (alors disciple de Guillaume) tombe à pic pour résoudre l'affaire.

Et si l'affaire, qui se passe en sept jours, passionne le lecteur, elle donne l'occasion à l'auteur de disserter sur différents sujets : le rôle du rire, la pauvreté des religieux, le lien entre le savoir, la possession et le pouvoir, le rôle de la bibliothèque. Dissertations qui amènent le lecteur à nourrir sa réflexion et à se documenter.

La période choisie est foisonnante d'évènements politiques et religieux où différentes factions luttent pour leurs doctrines, période qui annonce le grand schisme d'Occident dans les années à venir. Il est parfois difficile de s'y retrouver parmi les mouvements vus comme hérétiques et les différents évènements qui en découlent. Si certains sont connus notamment les cathares, certains sont plus confidentiels. Avec Umberto Eco, on apprend énormément de choses et c'est nettement le cas ici. Certaines histoires sont fascinantes notamment celle concernant Fra Dolcino, chef du mouvement apostolique.

Et si cette période trouble se prête si bien au roman, l'auteur a su magnifier une atmosphère sereine au sein de cette abbaye qui, peu à peu, devient pesante et angoissante. Le lecteur suit le rythme des moines à travers des chapitres divisés en offices. Une plongée dans le quotidien des moines intéressante qui imprègne de mystère l'atmosphère. Les crimes perpétrés sont l'occasion de découvrir les lieux et le fonctionnement de l'abbaye. Le point culminant étant la découverte de la bibliothèque, lieu sacré et interdit, creuset de la connaissance universelle dont seuls les initiés ont accès. Un labyrinthe dangereux qui semble refermer de terribles ouvrages qui pourraient être liés aux crimes. Un lieu central qui illustre que le savoir est le pouvoir.

Il ne faut pas oublier la force des personnages que nous présente Umberto Eco. Guillaume de Baskerville, Sherlock Holmes médiéval, est un être d'une grande subtilité et à l'intelligence aiguisée mais qui n'est pas dénué d'humour. Ses traits d'esprit marquent le lecteur et choquent parfois son apprenti Adso, Watson avant l'heure, notamment sur les reliques de saints, discussion savoureuse et drôle. D'autres figures marquent l'esprit : Jorge de Burgos, Ubertin, Salvatore... Chacun représentant une face de la religion.

Si la lecture n'est pas toujours aisée, le style reste agréable et plutôt fluide. Les citations en latin et en allemand non traduites dans mon édition ne m'ont pas trop gêné et même avec mon latin de collège, j'ai su décrypter en majorité les écrits.

Avec ce premier roman, Umberto Eco s'imposait déjà comme un grand maître de la littérature. Oeuvre magistrale, Le nom de la rose embarquera le lecteur dans un Moyen-Age bouillonnant et inquiétant. Une véritable réussite que le lecteur appréciera en passant outre les quelques longueurs.

 

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